La formation d’imams français au Maroc, une « étape »

En visite au Maroc, le président de la République a signé un accord avec le royaume chérifien.

Il prévoit l’envoi d’une première promotion de 50 futurs imams qui reviendront officier en France. L’Union des mosquées de France reconnaît qu’il s’agit là d’une « étape » avant l’ouverture d’instituts de formation sur le sol français.

Les imams seront maintenant envoyés au Maroc pour suivre une formation, avant de revenir exercer en France.

Que dit l’accord de formation des imams entre la France et le Maroc ?

À l’occasion de la visite du président de la République, François Hollande, au royaume du Maroc, les deux pays ont signé samedi une déclaration conjointe« relative à la coopération en matière de formation d’imams ». Une cinquantaine de Français entameront cette année une formation de trois ans à l’Institut Mohammed VI, ouvert en mars à Rabat par le roi du Maroc pour accueillir un millier d’étudiants venus de tous les pays (Mali, Guinée, mais aussi Tunisie, voire Émirats ou Koweït). Le texte souligne que cette formation devra promouvoir « un islam du juste milieu » conforme aux « valeurs d’ouverture et de tolérance ».

Une vingtaine de Français suivent déjà le cursus depuis le mois de mars. Une trentaine devrait les rejoindre ce mois-ci, pré-selectionnés par l’Union des mosquées de France (UMF), fédération musulmane proche du Maroc. Son président, Mohammed Moussaoui, indique avoir reçu près d’une cinquantaine de candidatures.

Hommes ou femmes – celles-ci pourront devenir mourchidates et donc enseigner l’islam à d’autres femmes – les candidats sont âgés de 22 à 40 ans, prêts à vivre en internat et titulaires au minimum du baccalauréat. L’accord prévoit qu’à leur retour, les futurs imams suivront, en France, l’un des douze diplômes universitaires créés ces dernières années – à la Catho de Paris ou ailleurs – pour leur enseigner le droit des cultes et la laïcité.

Que change cet accord ?

« La France manque d’imams capables de promouvoir les valeurs de respect de l’islam », assure Mohammed Moussaoui. Jusqu’à présent, le Maroc – comme l’Algérie ou la Turquie – envoyait ses ressortissants après une très brève formation au français et à la laïcité.

Les futurs diplômés de l’Institut Mohammed VI ont déjà, eux, « une connaissance de la société française », souligne l’UMF, qui met en avant aussi la présence, dans le cursus, d’une « initiation aux sciences humaines » ou de cours sur « le contexte français ». Une présentation « des autres grandes religions » est également prévue, à propos de laquelle l’Institut œcuménique de théologie Al Mowafaqa, basé à Rabat, a été approché.

Mais, pour l’essentiel, la formation théologique des futurs imams restera la même que celle de leurs confrères officiant au Maroc, en Afrique ou dans le Golfe. Pour une théologie « adaptée » au contexte français, il faudra encore attendre.

« Aujourd’hui, il faut le reconnaître, nous n’avons pas les compétences ici : ce serait une formation bâclée », fait valoir le président de l’UMF. « Nous espérons former 200 ou 250 personnes au Maroc et, parmi celles-ci, repérer quinze ou vingt futurs enseignants pour la France. C’est une étape. Après, nous volerons de nos propres ailes ».

Quels sont les autres chantiers de l’UMF ?

La formation des imams est l’une des priorités identifiées par l’Union des mosquées de France à l’issue d’un cycle de conférences régionales sur « la radicalisation religieuse ». Le rapprochement des imams au sein de « conseils régionaux » est également à l’étude, pour leur permettre d’avoir « une parole plus forte » ou de « travailler ensemble sur le prêche du vendredi ».

Les imams seront également formés à l’utilisation d’Internet et des réseaux sociaux, « principaux véhicules » de la radicalisation, mais aussi à une juste compréhension de la laïcité « qu’ils ne doivent pas laisser présenter comme un étendard contre la religion musulmane ».

Enfin, l’UMF prévoit de renforcer son action en faveur du dialogue interreligieux, du « respect de la liberté religieuse et du pluralisme religieux »,auprès des imams, qui devront « enseigner le respect des autres traditions »,mais aussi des familles « où se fabriquent souvent les préjugés et les stéréotypes ».

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Fin de la brouille entre Rabat et Paris

François Hollande et le roi Mohammed VI se sont employés à consolider la réconciliation franco-marocaine lors d’une visite de deux jours du président français à Tanger, qui s’est terminée le soir du dimanche 20 septembre 2015. L’objectif de ce déplacement était de démontrer que la crise diplomatique de près d’un an provoquée par des dépôts de plaintes en France pour « torture » visant le patron du contre-espionnage marocain, Abdellatif Hammouchi, était bel est bien terminée. Et que le temps était venu de renouer les liens traditionnellement forts de la France avec le royaume, allié de poids sur les plans sécuritaire, politique et économique.

Source: Anne-Bénédicte Hoffner, le 21/09/2015 à 18h02

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